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Mais où est donc passé The Weeknd ?

Son dernier album est un peu comme cette discussion qui précède une rupture. Vous savez, celle pendant laquelle on hésite à laisser une dernière chance. L’artiste canadien, pourtant très talentueux, déçoit dans son dernier opus Starboy.

The Weeknd jouit d’un talent indéniable. Il l’a déjà prouvé à travers de brillants albums tels que House of Balloons, Echoes of Silence ou encore l’excellent Kiss Land. Des albums marqués dès la première seconde du sceau de The Weeknd. Impossible de se tromper.

Quand il assure la première partie de son vieil ami Drake à Bercy en février 2014, il n’est pas loin de l’éclipser tant sa performance envoute chaque millimètre carré du POPB. Une coupe de cheveux indescriptible, un visage que personne ne connait vraiment et, par-dessus tout, une voix que certains confondraient presque avec celle du roi de la pop, Michael Jackson (il n’y a qu’à écouter D.D, sa reprise de Dirty Diana).

Un coup oppressant, un coup libérateur, un album de The Weeknd vous plongera quoi qu’il arrive dans une profonde introspection (bon courage à celui qui viendra vous déranger en pleine écoute).

Sa musique est puissante, inclassable, un ovni qui vous traverse inlassablement. Des morceaux tels que Next, Wicked Games, Loft Music ou encore Montreal en sont les parfaites incarnations.
The Weeknd vient vous saisir la nuit, quand plus rien ne se passe et que, d’un coup d’un seul, vous vous sentez seul au monde. En réalité, ça n’est rien de plus qu’un pur moment d’égo trip. Mais qu’est-ce que c’est bon !

Starboy n’est pas raté (on ne va pas tout de même pas se gâcher le plaisir d’écouter un nouveau The Weeknd). Il est entraînant et, comme dans chacun de ses disques, on ne s’ennuie pas. Quand on jette un œil à la liste des invités, (Daft Punk, Kendrick Lamar, Future…) il nous met l’eau à la bouche cet album.

Mais cette fois, la magie ne prend plus. À terme, on en vient à se demander où est passé The Weeknd. Je veux dire, le vrai The Weeknd. Celui qu’on s’empresse d’écouter quand on doute. Celui qui nous fait croire que nos problèmes ne sont rien comparés aux siens.
Le chanteur décadent qu’on aime tant est porté disparu.

Cet album ne lui ressemble pas, il est policé, prêt à l’emploi: sous la douche, dans le métro ou en boite de nuit. Alors on attend, on espère ce moment où le canadien va enfin nous embarquer dans son univers. Malheureusement, il ne viendra jamais. J’ai bien essayé mais, même avec tout la volonté du monde, je suis resté cloué dans ma rame de métro.

L’artiste profondément sombre et torturé a finalement laissé place à un chanteur enjoué dont les problèmes semblent s’être miraculeusement évaporés. Hasard ou non, The Weeknd a coupé ses cheveux qui, jusque là, faisaient toute son originalité.

Les featurings ne fonctionnent pas non plus. Kendrick Lamar, actuellement au sommet du rap n’apporte pas grand chose au titre Sidewalks qui pourrait aisément se passer de lui. Même chose pour l’apparition de Future sur All I Know qui est sans grand intérêt.
Le style, si atypique, de The Weeknd rend quasiment impossible la cohabitation avec d’autres artistes.

Malgré cette regrettable perte d’identité, il faut reconnaître que cet album apporte un peu de fraîcheur. En majeure partie grâce aux Français de Daft Punk qui ont su imposer leur style dans les morceaux Starboy et I Feel It Coming. Leurs légendaires voix robotisées tiennent à bout de bras un album qui peine à décoller.

Mises à part quelques fulgurances (notamment Love to Lay et A Lonely Night) qui rappellent, non sans peine, la belle époque, Starboy ronronne, une heure durant, sans jamais vraiment trouver sa place.
Sans jamais croiser le vrai The Weeknd.

Thomas Tissaud