Hitek : un premier stage, un ressenti

Hitek, qu’est-ce ? Sur son site, la rédaction se présente comme étant « le webzine de toutes les actualités High-Tech et Geek : les nouvelles technologies, les produits mobiles et la culture geek. »

Autant dire que, pour un jeune élève en journalisme comme moi, se définissant comme « geek » au sens actuel, c’est-à-dire curieux, baignant dans la culture « Internet » et accessoirement appréciant les jeux vidéo ou les jeux de rôles, faire un stage dans cette rédaction était une aubaine, un rêve, en quelque sorte, permettant de découvrir les « arcanes » de ce genre de rédaction somme toute atypique.

Dissection de l’entreprise

La rédaction de Hitek est composée, à environ 65% de son effectif, de stagiaires engagés comme rédacteurs, avec un Community Manager, deux rédacteurs en chef, un informaticien, une comptable et le directeur de la rédaction. A cet effectif de base se greffent des « extras », des rédacteurs externes à la rédaction qui prennent des articles parfois plus spécialisés, afin d’aborder certains sujets de façon plus poussée, sans pour autant retarder les rédacteurs « officiels ». Enfin, l’on peut trouver les contributeurs, qui sont des personnes extérieures à la rédaction, qui ont la possibilité d’écrire des articles de leurs choix et de les faire publier sur Hitek.

Pour entrer au sein de la rédaction, en tant que stagiaire, plusieurs prérequis doivent être remplis : savoir parler, lire et écrire l’anglais, avoir un bon niveau en écriture, être capable de faire des recherches complémentaires afin d’étoffer son article et enfin, écrire assez vite : il est possible que l’on ait à traiter certains sujet en urgence, ou ASAP, selon le jargon consacré (As Soon As Possible).

Pourtant, en soit, l’ambiance est assez agréable : comme dans toutes les autres rédactions (ou presque), on échange en appelant ses collègues par leurs prénoms, on plaisante, on se détend, on va boire un verre ou manger au restaurant ensemble, etc… Bref, d’une certaine façon, on finit par se couler doucement dans le moule. Jour après jour, on écrit les articles, choisis parmi les sujets déposés dans une boite mail commune, et alimentée par les rédacteurs en chef, voire par le directeur de la rédaction au fur et à mesure de la journée.

Mission des stagiaires

La tâche allouée aux stagiaires est relativement simple : il suffit de traduire un article provenant de Kotaku, Cracked, Looper, etc… Et de l’arranger à sa sauce, pour ne pas faire un littéral copier-coller de l’article de base. L’intérêt est, pour le stagiaire, de se démarquer en mettant son style en avant, afin d’éviter un article somme toute générique sur le sujet, et qui est lu et relu par les lecteurs sur d’autres médias. Ou bien d’atténuer des sujets lourds, assez difficile à présenter.

Extrait d’un article traitant des soins à apporter en cas de piqûre de méduses.
Extrait d’un article traitant des soins à apporter en cas de piqûre de méduses.

Il n’est pas rare que ces singularités se remarquent… Même si cela risque de semer le doute chez les lecteurs.

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Les sujets traités sont variés : séries télévisées du moment, rumeurs concernant les prochaines sorties de consoles dernières générations, celles concernant les jeux les accompagnants, des articles scientifiques, des … Et surtout, les tendances « geek » du moment. Par rapport à ma période de stage, Juin-Juillet et Août, les (grosses) tendances furent Game of ThronesOverwatch, l’E3 2016 et Pokémon Go.

Le principal souci du rédacteur est le fact-checking. En effet, et notamment dans un webzine geek (nous y reviendrons plus bas), il est nécessaire d’être sûr à pratiquement 100% de la véracité de ses sources. Or, il est parfois difficile de concilier cela avec l’obligation de rédiger un article rapidement, ce qui créé une certaine contradiction avec la mission initiale.

Les critiques de l’entreprise

Cette contradiction devient rapidement problématique, aux yeux des rédacteurs. En effet, et c’est le principal inconvénient d’un webzine dont le lectorat ciblé est un lectorat « geek » : ces derniers se transforment en experts sur n’importe quel sujet, à partir du moment où ils considèrent que l’article est incomplet, voire hors-sujet. L’article se doit d’être parfait, selon eux, peu leur chaud les connaissances du rédacteur en la matière, et en particulier quand on aborde les sujets scientifiques.

Bien logiquement, l’erreur retombera sur le rédacteur, et ce dernier ne peut faire qu’une chose : accepter le blâme, tout en se plaignant en son for intérieur qu’il n’a pas nécessairement les connaissances  nécessaires pour travailler sur le sujet en question, et qu’il n’a techniquement pas le temps de se documenter assez pour donner un article à la hauteur des attentes des lecteurs.

La majorité des articles traitant de la tendance actuelle, et notamment ceux sur Pokémon Go, finissent par lasser les lecteurs, en particulier quand ils sont partagés sur Facebook. Là, le titre est changé, généralement pour le rendre plus accrocheur, accompagné d’un commentaire tout aussi racoleur.
Exemple :

Article sur le site : Un joueur de Pokémon Go se fait passer à tabac et dépouiller par des petites frappes en embuscade
Article sur Facebook : Vous ne devinerez jamais ce qui est arrivé à ce joueur de Pokémon Go ! (Accompagné d’un commentaire du genre : « C’est horrible, pourquoi font-ils cela ? » suivi de l’émoticône « Choqué »).

Et les commentaires, sur le site, s’en ressentent :

Deux commentaires, venant d’articles traitant tous deux de Pokémon Go.
Deux commentaires, venant d’articles traitant tous deux de Pokémon Go.

Plus encore, si les lecteurs sont lassés de voir cinq articles par jour sur le même sujet, les rédacteurs, eux, en rédigent en tout huit à dix, qui ne seront pas nécessairement partagés Facebook. Toutefois, si les rédacteurs, et surtout les stagiaires ne vont pas tenter le diable en se plaignant, les lecteurs, eux, ne s’en privent pas :

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« La quantité prime sur la qualité »

Si ce lecteur, sardane, a malheureusement raison, sans pour autant avoir toutes les informations en main. En effet, le financement d’Hitek est divisé en deux parties : l’e-commerce (partenariats avec la Fnac ou Amazon, entre autre) et la publicité. Cette dernière est visible en début des vidéos (en lecture automatique, sur chacun des articles), en « bannière » et parfois, sous les vidéos. Dans ce cas de figure, il faut alors attirer un maximum de lecteurs sur le site, afin de « rentabiliser » l’article par un nombre de « clics » (de visites) plus ou moins élevé.

Il est d’ailleurs déjà arrivé qu’un article, au contenu pourtant intéressant, publié sur Facebook, soit retiré dudit réseau social car il n’avait pas généré autant de « clics » souhaités.

Mon ressenti général

Je l’avoue, mon avis est mitigé quant à ce stage. J’ai l’impression de ne pas avoir appris autant que je ne l’aurais souhaité, pour être tout à fait franc. Et surtout, une certaine pression est maintenue sur les rédacteurs, puisqu’il faut que soient publiés au minimum 100 articles en une semaine. Or, il faut concilier, comme vu plus haut, la nécessité de sortir rapidement ces articles avec l’obligation morale d’écrire des articles qui soient bien documentés, ce qui est somme toute assez difficile… Sauf quand on écrit le quinzième article de la semaine sur des joueurs de Pokémon Go ayant dérangé des riverains en se rassemblant près de chez eux, ou quand ils ont préféré sauver un agneau de la noyade au lieu de capturer un Hypotrempe…

Mais, d’un autre côté, on a la possibilité de se glisser au sein d’une petite rédaction-web, en lieu et place d’une rédaction d’un grand journal, qu’il soit mensuel, hebdomadaire ou quotidien et de voir comment ces petites rédactions s’organisent, quels sont les rôles de chacun de ses membres.  De plus, il y a toujours une possibilité pour que l’on puisse acquérir de nouvelles connaissances dans divers domaines, qu’ils soient littéraire, cinématographique, vidéo ludique, scientifique ou télévisuel (par exemple), connaissances qui ne sont pas nécessairement superflues et peuvent toujours être utiles plus tard, qui sait ?

Enfin, cela m’a permis de mieux cerner vers quel catégorie de journalisme je souhaite m’orienter (la culture), tout en gommant une partie de ma naïveté.

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