Du minitel à la webtélé, le pionnier Basket USA

Avec un million de visiteurs uniques par mois, Basket USA est le premier site francophone traitant de basket américain. Depuis sa création en 1993, alors que Michael Jordan et sa Dream Team venaient de faire la meilleure publicité qu’un sport ait connu en éblouissant les Jeux Olympiques de Barcelone, « BUSA » s’est imposé comme la référence NBA en France. Pure player, le site ne connait presque pas les problèmes de droits liés au support télévisé, ni celui de la transition numérique de la presse. Né sur le minitel, Basket USA est un pionnier du web.

Profitant du traitement famélique du « plus grand quotidien sportif français », l’Equipe, Basket USA ne cesse de grandir. Seul support offrant la possibilité aux francophones de suivre l’actualité de la NBA au quotidien, le site grossit avec Internet, jusqu’à exploser au cours de la décennie passée et devenir le porte drapeau de la ligue nord-américaine en France.

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Des audiences qui sont difficiles à retrouver en ligne et pour cause : « On ne peut paye pas le forfait annuel de l’OJD (Office de Justification de la Diffusion) pour apparaitre sur leur site, ce n’est pas une nécessité vis à vis des annonceurs » explique Fabrice Auclert. Devenu « Alliance pour les chiffres de la presse et des médias » (ACPM), l’ex-OJD est une association professionnelle certifiant les chiffres de diffusion de la presse en fonction de différents critères, notamment l’audience. Essentielle à certains afin d’attirer des annonceurs publicitaires, pratique à d’autres pour faire valoir leurs chiffres à des partenaires ou à la concurrence, la plateforme ne répertorie pas Basket USA. « On serait dans le Top 50 si on y était » assure son rédacteur en chef, « au niveau de Paris Match ». Comme le souligne un salarié du groupe Lagardère, détenant Paris Match, « ils n’ont pourtant pas la même force de frappe, les mêmes moyens en coulisses ».

Basket USA fait également partie d’un groupe : Eureka Presse. Co-fondateur et associé de « EP », Fabrice Auclert a racheté le site de basket pour 1€ symbolique en 2001 alors qu’il n’en était qu’un simple salarié. Aujourd’hui, le groupe édite Linternaute.com, cnetfrance.fr, larevueautomobile.com ou encore les sites web de Free et des Pages Jaunes. Basket USA est la tête de gondole de cette galaxie bien fournie qui réalise 500 000€ de chiffre d’affaire annuel.

GalaxieEurekaPresse

« BUSA est le premier site du groupe, mais pas celui qui rapporte le plus d’argent » précise Fabrice Auclert, qui était encore seul avec son associé co-fondateur au sein d’Eureka Presse en 2009. Sept ans plus tard, « EP » compte sept salariés, une progression notable dans ce secteur à coupler avec celle qu’a connu son chef de file Basket USA. Le nombre de joueurs dans l’équipe BUSA a ainsi doublé sur la période pour atteindre les quatorze aujourd’hui. Son capitaine Fabrice Auclert s’est entouré d’un développeur, de quelques journalistes et d’une poignée de pigistes répartis aux quatre coins de la France et des Etats-Unis.

Basket USA ne connait pas les crises

C’est en faisant confiance aux différents jeunes se succédant en contrat de professionnalisation au sein de l’entreprise que Fabrice a agrandi la rédaction, en les « titularisant » à la sortie de l’école. Une rédaction qui, de par la spécificité de l’information traitée, fonctionne différemment des structures classiques. Ainsi, BUSA n’a pas de locaux, pas de bureaux physiques, tous les échanges se faisant par le biais d’Internet et de l’application Slack. Les matchs ont lieu en pleine nuit en France, se terminent quand l’Hexagone se réveille, et finalement les Etats-Unis se lèvent progressivement de la côte Est à la Côte Ouest en fin de journée à Paris. Pas facile de faire vivre une rédaction physique avec ces horaires déroutants.

Les journalistes se succèdent pour écrire les résumés des matchs entre 00h et 6h (il peut y avoir jusqu’à quatorze rencontres par nuit). Fabrice s’occupant de la mise en ligne à l’heure où les Français se lèvent, pour qu’ils puissent découvrir les résultats, actions et réactions des joueurs NBA en prenant leur petit-déjeuner. Le fil d’actualité est concentré sur ces matchs jusqu’à la mi-journée, puis ce sont les papiers plus froids, analyses ou prévisions de la soirée à venir, qui prennent le relais l’après-midi. Jusqu’à laisser leur place aux commentaires et actualités des joueurs qui s’entrainent aux USA à l’heure ou le soleil se couche ici. Les Français terminent leur journée en lisant ces dernières informations sur les transferts ou l’état physique des joueurs, alors que ceux-ci se préparent tranquillement à jouer un autre match. Et ainsi de suite. Soit 18h d’actualité chaude et 6h d’actualité froide à traiter pour Basket USA.

Premier média traitant de sport américain, Basket USA a vu naître plusieurs petits frères à ses côtés : Popnsport, qui met en ligne des contenus décalés liés au sport, ou encore l’éphémère Basket Europe, qui a permis à BUSA de combler le plus grand vide de son histoire lors de la grève des joueurs en 2011. Un « lock out » œuvre du syndicat des joueurs qui paralysa la NBA le temps de renégocier les droits de ceux-ci. Une demi saison blanche, comme déjà en 1999, au cours de laquelle BUSA fût privé de sa moelle et dût donc trouver des solutions pour continuer de fonctionner. Traiter l’actualité européenne en sera une, tout comme faire appel à des experts pour commenter l’évolution des négociations et en expliquer les tenants et les aboutissants. Chose que ces concurrents n’ont pas su faire, laissant BUSA repartir encore plus fort à la sortie de ce « lock out ».

Du minitel à la webtélé

Une des forces sur lesquelles a également pu capitaliser Basket USA est la webémission qu’elle diffuse, le Hoopcast. D’abord sous format radio, puis vidéo lorsque la plateforme Dailymotion propose de le produire, le show à su se forger une solide communauté partagée entre anciens lecteurs de BUSA et nouveaux arrivants sensibles à l’analyse et au ton débridé de ses chroniqueurs. Aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 30 000 internautes qui attendent chaque semaine les échanges animés de Thomas Dufant et Erwan Abautret arbitrés par Alain Mattei.

Axe de réflexion actuellement à l’étude : le développement de Basket USA à l’étranger. Outre les nouvelles versions de son application et le lancement d’une boutique en ligne de vêtements, Fabrice Auclert a ainsi réfléchi à l’extension de la marque Basket USA en dehors de l’hexagone mais pour l’instant, l’idée reste à l’état de projet. « On a fait des études de marché, et la gestion des droits vidéo est différente » regrette le rédacteur en chef. « C’est donc compliqué de faire le même travail sans vidéo ». Et si BUSA continue son bonhomme de chemin malgré le récent partenariat signé par la NBA avec l’Equipe, que ce blog évoquait à l’automne dernier, Fabrice préfère rester francophone avant de traverser l’Atlantique. « On préfère être numéro 1 en France que de se disperser à l’étranger, où l’on ne sera que des ‘sous-ESPN’ (leader de l’information sportive aux Etats-Unis, ndlr) ». Rester unis pour mieux régner.