Exercice – Réaliser le portrait d’une personne qui s’est dépassée.
Sujet choisi : Ma mère, survivante du coup d’état de Pinochet au Chili, en 1973.
Exercice – Réaliser le portrait d’une personne qui s’est dépassée.
Sujet choisi : Ma mère, survivante du coup d’état de Pinochet au Chili, en 1973.
Dans le cadre du lancement de la fondation Good Planet, Yann Arthus Bertrand a fait appel aux apprentis journalistes de l’EFJ pour écrire 615 portraits de personnes engagées dans la protection de l’environnement.
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Il achète des terres de Patagonie pour en faire des réserves naturelles. Douglas Tompkins a fondé les marques d’équipements sportifs Esprit et The North Face avec sa femme Kristin. Grand amateur de randonnée, Tompkins réalise avec le temps la contradiction entre sa passion pour la nature et le business de ses entreprises. Lui et sa femme vendent alors leurs parts et s’installent dans un ranch au sud du Chili. Amoureux des grands espaces, le couple s’engage pour la protection des paysages. Il rachète terre après terre au Chili, puis en Argentine et fonde des associations dédiées à ces réserves naturelles. Le parc Pumalin de Tompkins est même reconnu, après avoir été perçu d’un mauvais oeil par la population autochtone, comme « sanctuaire de la nature » par l’Etat chilien. Douglas aime la nature mais adore aussi le risque. Trop. Suite au chavirement de son kayak dans le lac General Carrera au Chili, il décède en décembre 2015 des suites d’une hypothermie sévère. En 2017, sa veuve a fait don de 410000 hectares de terres au Chili pour en faire des espaces sauvages protégés.
(publié dans 615 histoires sur l’engagement, p.38, Fondation GoodPlanet)
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Vous ne la connaissez peut-être pas encore, mais Mariapia Borgnini est une artiste à ne pas sous-estimer.
Du haut de ses 65 ans, elle a exposé individuellement comme collectivement, en Suisse comme à l’étranger, et participé en tant que jurée à de nombreuses remises de prix. Et elle ne s’arrête pas : son exposition Enoisullillusione est actuellement ouverte au public au Musée cantonal d’art de Lugano, en Italie. Mais alors, qu’est-ce qui rend Mariapia Borgnini incontournable ?
Tout d’abord, son rapport à l’art. Mariapia puise dans ses interrogations personnelles, dans ses doutes, pour créer. Mais plus que de vouloir s’exprimer et partager ces sentiments, elle cherche à questionner ses spectateurs. Le but de ses expositions, c’est d’encourager l’autre à regarder au plus profond de lui même et ainsi peut-être trouver des réponses. C’est en cela que cette passionnée de psychologie travaille l’art-thérapie. Elle utilise l’art pour se soigner et soigner les autres.
C’est notamment le cas de son exposition Enoisullillusione, qui est la contraction du mot « illusione » et de sa version miroir. Illusione. Enoisulli. Enoisullillusione. Un titre qui met tout de suite sur la piste de l’intention de l’artiste: que l’on expérimente cette exposition comme le fait de se regarder dans un miroir. S’interroger ainsi sur l’image que nous renvoient ses oeuvres. La plus parlante des créations à découvrir lors de la visite est celle d’un petit train qui tourne en rond, très faiblement éclairé, portant le mot « enoisullillusione » qui se reflète indéfiniment sur le mur blanc de la salle. Lorsque l’on demande à Mariapia pourquoi avoir choisi de placer ce mot sur ce petit train, elle nous parle de l’enfance. Ce jouet nous rappelle cette douce période où les vérités se reposaient sur ce que l’on voyait, le reste du monde n’étant alors encore qu’une question d’imagination. C’était déjà une certaine forme d’illusion. Mais était-elle bonne ou mauvaise ?
De par sa passion pour la psychologie, Mariapia Borgnini connait un nombre incalculable de notions concernant le mécanisme de l’esprit humain. Entre deux explications de création, elle cite la capacité négative de John Keats. Le poète anglais avait à son époque évoqué ce concept comme étant la façon que l’on pouvait avoir à se complaire dans le mystère et le doute, de ne pas prêter autant d’attention à la raison. C’est sa façon à lui de justifier sa capacité à écrire de la poésie. C’est cette même capacité que Mariapia utilise. Elle puis dans ses doutes l’inspiration, et comme elle touche ainsi à des questions universelles, ses oeuvres peuvent résonner chez le spectateur. Ainsi, que ce soit à travers ses oeuvres ou à travers son processus de création, l’artiste doute, mais crée, et ainsi trouve le moyen d’accepter à bras ouverts cette incertitude.
Elle se réfère également à l’écrivain irlandais Samuel Beckett et son fameux « Ever tried. Ever failed. No matter. Try again. Fail again. Fail better. » Autrement dit, on ne s’améliore qu’en acceptant l’échec comme faisant partie du processus. Ainsi, elle trouve toujours la limite à sa propre incertitude, elle ne se perd pas dans ses doutes.
« Nous avons tous besoin de l’illusion et de l’utopie pour vivre », conclut-elle.
Dans un appartement de Montmartre, au beau milieu d’un joyeux bordel de pots de peintures, de toiles et de dizaines de pinceaux éparpillés, il est là. Astolfo Zingaro, peintre d’origine italienne, aujourd’hui âgé de 85 ans.
Zingaro est autodidacte, il n’a jamais été dans une école d’art, jamais étudié touts les différents styles de peinture. Il raconte s’être simplement rendu un jour Place du Tertre, à Paris, et avoir observé les artistes présents sur place. Certains y proposent encore de nos jours des portraits aux touristes, d’autres vendent des paysages. Impressionné par toute cette volonté artistique, il se sent inspiré et se lance.
« C’est dur de tenir le coup », nous dit-il en peignant une nouvelle toile. Comme n’importe quel artiste débutant, Zingaro a douté, s’est remis en questions, a failli abandonner. « C’est douloureux » ajoute-t-il, alors qu’il est peintre depuis des années maintenant. Il nous parle de sa sensibilité, cette « putain de sensibilité » qui les caractérise, lui et ses pairs. Celle-là même qui est à l’origine de toutes ses oeuvres. Celle qui éveille l’âme autant qu’elle l’écrase. Celle que l’on adore détester. « On est tous pareil » conclut Zingaro en ajoutant un trait de peinture à son oeuvre.
Concernant ses oeuvres, il se dit ne pas être dans l’abstrait. Qu’il n’est qu’extérieurement abstrait. Dans son cas, c’est la toile qui le conduit. S’il essaie de prendre le dessus, il se perd très vite et l’oeuvre est ratée. Il faut laisser faire sa sensibilité. Il sait que ses peintures sont majoritairement monochromes, qu’elles sont très grises. Il aimerait pourtant peindre des choses plus bestiales, plus fauves.
« L’art contemporain, c’est l’aventure », conclut-il.