« On ne se sentait plus à notre place »

D’après la CNCDH (La Commission nationale consultative des droits de l’homme), les Français Juifs concentrent 40% des “actes de haine” alors qu’ils représentent moins de 1% de la population française . En 2017, 4000 juifs ont fait leur Alya. D’autres quittent simplement leur quartier car ils ne s’y sentent plus à leur place. C’est le cas de Sandrine*, Sabine et Salomon.

Un sentiment d’insécurité au quotidien…

 

Sandrine, 40 ans, est originaire du Val d’Oise. À l’arrivée de ses enfants, elle est venue s’installer à Enghien Les Bains et la situation a rapidement dégénéré.

Les problèmes démarrent en 2015. Sandrine a inscrit ses fils au centre de loisirs. “Mes enfants m’ont parlé d’un animateur “pas sympa”. Mais je n’y prêtais pas attention”.

Le jour de la rentrée des classes, Sandrine part chercher ses enfants. Celui qui a fait sa rentrée en CE2 fait une étrange révélation. “Mon fils m’a dit que l’animateur qui faisait la sortie était celui qui leur avait dit qu’il fallait être Musulman plutôt que Juif car les Palestiniens tuent les Israéliens. Jamais mon fils ne m’en avait parlé, j’ai alors compris que mes garçons avaient été victimes d’antisémitisme”.

Après cette affaire, un sentiment d’insécurité s’installe. “Nous vivions dans une maison en plein coeur de la ville et pourtant des bandes s’installaient autour de chez nous, ce n’est pas qu’on osait pas rentrer, on avait peur”.

“En 2012, on a dû quitter le 93 car on était Juifs”. Sabine, 39 ans, est maman de 3 enfants. A cette époque, il était âgés de 12, 9 et 5 ans. “J’habitais aux Lilas depuis 2002, mais le quartier n’était pas mal fréquenté puis peu à peu il s’est dégradé et à plusieurs reprises mes fils se sont fait traiter de sale Juif”.

Cette maman très soucieuse du bien être de ses enfant a préféré quitter les lieux pour Vincennes, commune du 94. “J’ai moins peur pour mes enfants, je me sens plus en sécurité”. Maintenant le 93, c’est derrière eux, il est temps de tourner la page.

 

D’après la CNCDH, les préjugés antisémites touchent encore une minorité de la population : 20 % des Français jugent que  “les Juifs ont trop de pouvoir en France”, 38 % que “les Juifs ont un rapport particulier à l’argent” et 39 % que “pour les Juifs français Israël compte plus que la France”.

Le milieu professionnel également impacté…

 

Sandrine, est professeur dans un lycée public d’Enghien Les Bains. C’était l’année des attentats de Charlie Hebdo, une minute de silence était prévue sauf qu’elle n’a pas été respectée. “Si je vous dis que 30 élèves étaient en train de chahuter pendant la minute de silence et que la directrice n’en a pas touché un mot, qu’est-ce que vous en dites?”. Pour Sandrine, l’histoire de ses enfants et celle ci, s’en été trop. La famille a quitté Enghien Les Bains, pour Neuilly-sur-Seine, commune du 92, connue pour sa grande communauté juive.

Salomon, était médecin et du jour au lendemain sa vie a changé. ”On ne s’en remet pas, vraiment pas”. Depuis 1988, Salomon exerçait son métier de médecin dans son cabinet en plein coeur de Saint-Ouen. Quand il est arrivé, l’ambiance était calme, puis vers les années 2000 la tendance s’est inversée.

“Des jeunes criaient “sale Juif” en me voyant dans la rue, puis ma voiture a été vandalisée. C’était le début du cauchemar”. Le 1er mai 2000, Salomon découvre en passant par son cabinet que les murs étaient remplis de croix gammées. Il est alors parti porter plainte pensant qu’on allait lui trouver une solution mais voici la réponse qu’on lui a donnée : “Vous savez on ne peut rien faire si vous n’avez pas surpris l’action sur le faite, le mieux c’est que vous partiez”. Salomon est donc parti en 2002 dans le XVe arrondissement de Paris.

Certains juifs arrivent à surmonter cet antisémitisme. “On est dans un cocon maintenant”. Sandrine et sa famille semble vivre une nouvelle vie, même s’ils sont toujours nombreux à être victimes d’antisémitisme. “Il est grandissant en France, c’est devenu un phénomène de mode mais ce n’est pas pour autant que je ferai mon Alya surtout que je suis fonctionnaire” affirme Sandrine. Pour d’autre la douleur reste toujours présente. “Il ne fallait surtout pas en parler”. À l’arrivée de Salomon dans le XVe, ce n’était pas facile. “J’étais toujours en colère puis j’ai baissé les bras”. Il exerçait toujours sa profession, jusqu’au jour où les ressources ne rentraient plus. La seule solution pour qu’il continu à faire son métier était de faire des vacations dans des centres de santé. “J’ai tellement été déçu que maintenant, je m’en fous”.

En France en 2016, un acte raciste sur trois commis est dirigé contre une personne de confession juive.

 

Le 21 avril, un manifeste du nouvel antisémitisme a été rédigé par Philippe Val, il réunit 250 signataires dont l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, trois anciens Premiers ministres, l’ex-maire de Paris Bertrand Delanoë… “ L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs, c’est l’affaire de tous”.

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