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L’aventure berlinoise (portrait)

Elle réunit les acteurs, pose le décor et créer son propre monde emprunt de fantaisie. A la fois burlesque et dramatique mais également masque et miroir de la réalité : bienvenue dans l’univers de Valérie Favre.

Ville des arts, des artistes et des musées, animée et vibrante d’énergie, le contraste entre les édifices historiques et contemporains y est impressionnant. Mélange entre tradition et modernité, lumière et obscurité, nous voici à Berlin. Probablement l’un des lieux les plus passionnants d’Europe, Valérie Favre fait partie de ceux qui l’ont rejoint, de ces exilés pour l’art.

Elle parait reposée assise sur une chaise noire un peu usée, dans cette pièce aux murs blancs légèrement désordonnée, des esquisses au sol, des pots ici et là soulevant une toile à peine sèche. Elle parait pensive, douteuse peut-être ? « J’ai de plus en plus le doute, mais le doute constructeur ».

Dans sa jeunesse, c’était une battante, une touche à tout. Cette force, elle ne l’a pas perdue, elle a tout simplement su la maitriser. Aujourd’hui, la maturité lui a beaucoup appris. « Je suis beaucoup moins sure de moi, c’est plus calme, de plus en plus fragile. » Cette fragilité dont elle nous fait part avec une honnêteté déconcertante,  c’est ce qui la construit de jour en jour et la fait voyager dans son art.

 Son style est facilement reconnaissable : forêts enchantées, contes de fées, centaures, elfes, personnages hybrides, on peut même y apercevoir la mort : sujet qu’elle a abordé il y a trois ans.  Comme quoi, tout n’est pas utopique dans l’art de Valérie Favre.                             Passionnée de littérature, de théâtre et de cinéma, elle y puise une grande partie de son inspiration. Toutefois, elle le répète, elle reste fidèle à ce qui l’a toujours animé : « mon grand sujet c’est la peinture avec un grand P ».

A travers son travail, cette brune passionnée veut développer une notion chère à son cœur : le temps. Le temps qui nous emprisonne parfois, qui s’accélère, et surtout, le temps qui disparait. Alors elle s’interroge sans cesse, elle se remet en question et se répète : «Comment arriver à faire que devant mes peintures, quelqu’un reste figé plus de dix secondes?» Alors, elle innove sans cesse, butine à travers les styles, les époques, les univers, tout en restant fidèle à son art.

Au-delà de n’être que peintre, Valérie Favre est une écrivaine, elle narre la vie, la réalité du monde qui nous entoure. Non pas avec des mots, mais avec ses coups de pinceaux virevoltants dans l’air pendant quelques secondes avant de frôler majestueusement  la toile. Pour elle c’est indéniable : « La peinture ne se limite pas à peindre des fleurs et des portraits, on peut aussi imaginer qu’avec l’aide de pinceaux et de couleurs, on peut faire réfléchir ».

Coup de foudre à Montmartre (portrait)

C’est l’histoire d’une rencontre, d’une évidence. La peinture et lui. Véritable coup de foudre qui dure depuis maintenant plus de 60 ans. Seulement cette histoire d’amour fusionnelle n’a pas toujours été si simple. Retour sur ce peintre mystérieux, Astolfo Zingaro.

Nombreux sont ceux qui les observent. Certains du coin de l’œil tout en passant leur chemin, d’autres les contemplent, assistant là, bouche bé,  à la naissance de l’œuvre. Les peintres de la Butte Montmartre attirent, fascinent. Ces hommes perchés non loin du Sacré Cœur, assis sur leurs chaises pliantes en pantalons de toile, chemises blanches et vestes en tweed ont été une véritable source d’inspiration pour Astolfo Zingaro. Dans son atelier, entre gouaches et vieux pinceaux usés par son majestueux coup de main,  cet italien d’origine et français de cœur, nous raconte avec une simplicité déconcertante comment l’évidence s’est un beau jour présentée à lui « j’ai essayé un petit matin et puis, j’ai su que c’était ça. Voilà comment ça a commencé».

Mais ne vous y fiez pas. Tout n’a pas toujours été si simple pour cet autodidacte de la peinture. Installé à Montmartre depuis toujours, Zingaro a du se confronter à la difficulté du métier d’artiste. Il fallait  « tenir le coup » nous livre t-il, la gorge nouée, les yeux vers le ciel, probablement en repensant à tous ses sacrifices. Pourtant, il ne baisse pas les bras face à « cette putain de sensibilité qui nous caractérise ». Zingaro est passionné et ça se sent. Pour perfectionner sa peinture, il observe, s’inspire de certains courants.  Ainsi, parmi ces grands noms  de la peinture italienne tels que Giotto, Piero della Francesca et bien d’autres encore, Astolfo Zingaro a su se frayer son propre chemin.

Et bien plus que ça. Zingaro ne s’arrête plus, il peint, encore et toujours. Des heures entières passées dans cet antre de la peinture à essayer d’arriver à son but ultime : une toile monochrome. Cette peinture composée de manière égale par une couleur uniforme. Car oui, l’art contemporain, c’est son dada. Zingaro a plongé dedans il y a plus de soixante ans et n’y est plus jamais ressorti.

Mais ce qui fait l’originalité de Zingaro, c’est la vision de son art. En effet, sa démarche de peinture est singulière. Zingaro en est convaincu : on n’apprend pas la peinture dans les livres « l’art contemporain c’est complètement l’aventure parce que c’est la toile qui nous conduit. Ce n’est pas nous qui dirigeons. A partir du moment où on veut diriger, on se plante, on devient crispé ». C’est là que tout devient intéressant. Lorsqu’il peint, Zingaro n’est plus maître de lui-même mais au contraire, devient le sujet de sa toile. Elle le conduit et l’emmène vers un ailleurs totalement inconnu.

Son art, Zingaro l’a transmis. Dans les débuts des années 1980, il pratique le modèle vivant dans de nombreuses salles de classes. Pour ses étudiants, Zingaro apporte de la nouveauté. Il amène  au devant de la scène ce que ces jeunes peintres eh herbe ne connaissent pas. C’est ce qui a fortement marqué certains d’entre eux.  Mais est-il réellement compris ? Il n’en est pas sur.

Une chose est certaine, Zingaro est l’emblème d’un nouveau courant. Celui qui se définit comme « extérieurement abstrait » et non « dans l’abstrait » entend bien se laisser mener par le bout de son pinceau jusqu’à ce que la mort les sépare.